18 février 2009
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Il y a plus de biodiversité autour des champs cultivés qu'à l'intérieur. Il n'y a plus ni fleurs ni mauvaises herbes dans nos champs. Mais un tiers de ces espèces, disparues entre 1970 et 2006, se retrouve quand-même, aujourd'hui, au bord des parcelles cultivées. La "révolution" agricole est passée, et sa chimie, et sa spécialisation des cultures. Augmentation des rendements et nourriture de la population, certes, si cette richesse était partageable... (voir le cas du riz ci-dessous); mais modification des paysages, mais aussi atteinte à la poésie. A la poésie ? Ce lien entre l'homme et la terre... Adieu coquelicots, chardons, ivraie...
Les "adventices" (les mauvaises herbes) sont utiles, contrairement à leur réputation. Leurs graines alimentent les oiseaux, leurs fleurs les insectes pollinisateurs (de 1989 à 2006, le nombre des oiseaux communs a diminué en milieu agricole, alors qu'il restait sable en ville...).
Dans ma "campagne", autrefois, je dus, par arrêté préfectoral, détruire mes chardons par moyens chimiques (avant le premier juillet) ou mécaniques (après cette date).
Toutes les adventices ne sont pas encore passées au couperet. Soyons les marges, et soyons adventices.
Prochaine étape de la colonisation du vivant: le riz
Dans les années 60, pour parer à un futur déficit alimentaire, de nombreux pays se sont lancés dans la " Révolution Verte ", privilégiant le passage d'une agriculture traditionnelle à une agriculture moderne, intensive. Cette "Révolution " portait principalement sur trois céréales : le maïs, le blé et bien sûr le riz. Cela a conduit, dans un premier temps, à un véritable boom de la production, mais rapidement, la production a stagné, car les monocultures ont entraîné un appauvrissement des terres agricoles; l'utilisation massive de pesticides a fortement pollué les sols et les eaux. Malgré des succès économiques rééels dans certains pays d'Asie (Malaisie, etc...), globalement la "Révolution Verte", porte d'entrée du capitalisme, a accentué les inégalités entre les producteurs. Et elle connaît actuellement une nouvelle phase avec les semences OGMhautement productives issues des biotechnologies.
Le riz est une des céréales les plus produites au monde: c'est l'aliment de base de la moitié de l'humanité. Dans les pays du Sud, les paysans cultivent le riz avant tout pour subvenir à leur consommation locale, et aujourd'hui encore, seule une petite partie de la production totale de riz est négociée sur le marché international. Mais...
La société Monsanto, par exemple, a développé une variété de riz transgénique résistante au " Roundup ", son herbicide vedette... Ces riz mutants ne profitent guère aux petits producteurs du Sud : il leur faut non seulement acheter ces semences améliorées à prix fort, mais également se procurer les intrants chimiques nécessaires à leur croissance auprès des mêmes sociétés. Seuls les riches exploitants peuvent s'offrir ce luxe, des millions de paysans n'en ont pas les moyens, et nombre d'entre eux, endettés, vendent leur terre et migrent vers les villes. Au profit des multinationales, des millions de paysans à travers le monde sont ainsi dépossédés de leurs moyens de production et perdent la maîtrise de ce patrimoine commun de l'humanité que constituent les semences.
Le système des brevets a été conçu il y a 125 ans pour protéger les inventions. Il peut être désormais appliqué au monde du vivant et constitue une nouvelle forme de colonisation (dans la logique du système biopolitique,1 celle du contrôle de la vie, du grain de riz juqu'à l'embryon humain). En 1998, 160 brevets sur le riz étaient recensés., et la grande majorité était détenue par des entreprises américaines ou japonaises. (brevetage-pillage du riz Basmati par la firme américaine Rice Tech par exemple !). Ce biopiratage est dénoncé par de nombreux citoyens, particuliérement en Inde.
Actuellement, on dénombre près de 100.000 variétés de riz à travers le monde. La banque de semences de l'IRRI conserve pas moins de 86.000 variétés issues de 113 pays. En favorisant l'usage d'un nombre limité de semences de riz améliorées, le modèle agricole actuel contribue au déclin de cette richesse. Ainsi, en Inde, 75% de la production de riz proviennent d'une dizaine de variétés à hauts rendements. En Thaïlande et en Birmanie, 5 variétés occupent 40% des surfaces rizicoles ; au Cambodge, un seul type de riz hybride a fournit près de 84% des récoltes en saison sèche.
- G. Dupont, Adieu coquelicots, chardons, ivraie, Le Monde, 17 février 2009
- http://www.madeindignity.be/
1. A écouter "Envoyé Spécial" sur la deuxième chaîne ce jeudi 19 février, on voit comment est portée aux nues la "révolution verte" et son cortège actuel d'OGM, alors que ces derniers ne sont qu'un outil de plus pour rendre dépendants de nouveaux "faibles" de la faim...