Chaque homme remplit dans sa vie un assez grand nombre de questionnaires (...) La réponse d'un homme à l'une de ces questions, c'est déjà un fil à jamais tendu entre cet homme et le fichier local des questionnaires. De chaque homme partent ainsi des centaines de fils et là où ils se réunissent, ils sont des millions, et si tous ces fils devenaient visible nous verrions le ciel couvert d'une toile d'araignée, et s'ils devenaient matériellement élastiques, les automobiles, les tramway et les gens eux-mêmes perdraient la possibilité de se mouvoir (...). Mais ils sont invisibles et immatériels, et pourtant ils sont perpétuellement ressentis par l'homme (...) Au compte de tout homme vivant, on peut toujours porter quelque chose de négatif ou de suspect, si on y regarde d'un peu près.
Alexandre Soljénitsyne
Le pavillon des cancéreux
Julliard, 1968